Vincere de Marco Bellochio © Ad Vitam

Vincere : érotique du fascisme

Critique
de Marco Bellochio
118 minutes 2009

Vincere raconte l'histoire de la femme et du fils "cachés" de Mussolini, liaison adultère dont il tenta dès son accession au pouvoir de faire disparaître toutes les traces : Ida Dalser et son fils Benito moururent enfermés à l'asile et furent jetés à la fosse commune.
En se plaçant ainsi dans une alcôve, Vincere éclaire l'histoire de biais. On y voit le glissement idéologique de Mussolini, ex militant socialiste, qui jettera sucessivement aux orties pacifisme, internationalisme, anticléricalisme pour lancer la "révolution" fasciste. Mais Vincere met surtout en scène une véritable érotique du fascisme, le personnage d'Ida Dalser (littéralement ravi par Mussolini) personnifiant la fascination de l'Italie pour l'énergie du futur "Duce".
Utilisant la lumière de manière quasi-expressionniste (le film est tout en clair-obscurs), intégrant de façon magistrale à sa narration les bandes d'actualité et les slogans d'époque ("La seule hygiène du monde c'est la guerre"), Vincere procède par bonds successifs (ainsi celui qui voit disparaître sans transition le Mussolini de fiction au profit de celui des actualités filmées), à la manière —violente— du mouvement futuriste dont Bellochio s'est inspiré. Enrichie d'une dimension opératique par la musique de Carlo Crivelli, la vision de l'histoire de Bellochio est d'une puissance renversante.