En signant l’adaptation du roman de Barbey d’Aurevilly, Catherine Breillat rejoint le bal à la mode des adaptations costumées, aux côtés de Jacques Rivette et de son Ne touchez pas la hache. A la différence notable, que s’il y a dans les deux cas souci de fidélité au texte littéraire, le langage paraît naturel et le rythme romanesque préservé par l’écriture cinématographique de Catherine Breillat, tantôt vive, tantôt lascive, à l'image de la panthère, animal fétiche de l’auteur dandy.Si comme le titre l’indique, la vérité réside dans la fidélité infidèle, la mise en scène reproduit de manière vertigineuse le paradoxe. En effet, si elle s’attache aux traits caractéristiques de l’écriture de Barbey : récit enchâssé (traduit en un flash-back entrecoupé), héroïnes féminines "viriles" et personnages masculins délicieusement féminins, elle sait aussi s’émanciper du roman, mais sans être hors-sujet, toujours avec l’objectif d’en restituer la vérité profonde, celle du romantisme des artistes. La Vellini et son amant Ryno partent-ils à l’étranger ? ce sera dans une Algérie digne de Delacroix ; la Vellini réside dans un hôtel particulier ? ce sera un musée improbable, évoquant davantage la célèbre maison de Pierre Loti qu’un appartement bourgeois du XIX°. Enfin, Fu’ad Ait Aattou incarne un Ryno renversant, que Breillat a choisi pour sa resssemblance avec le portrait de Lorenzo Lotto, mais aussi pour sa bouche sensuelle qui évoque le souvenir des adolescents du Caravage. Quant à la marque de fabrique de Breillat, ses fameuses scènes de nus, elles acquièrent une dimension picturale ; et quand elles s’animent, c’est pour faire respirer le texte de l’Amour.Une vieille maîtresse offre donc un tableau magistral de l’amour Romantique (au sens littéraire du mot), centré sur une Vellini haute en couleurs, à la fois maman et putain, sublime et parfois grotesque, le regard ironique de la réalisatrice rappelant le narration des récits de Barbey. On ajoutera que la distribution est taillée sur mesure jusque dans les seconds rôles, avec un Michaël Lonsdale cynique et une Yolande Moreau pétrie de bons sentiments hypocrites
Une vieille maîtresse de Catherine Breillat. Sélection Officielle