Jesus camp : de la théocratie en Amérique

Critique

Jesus camp : de la théocratie en Amérique

Une guerre a aujourd’hui lieu sur le territoire des Etats-Unis. Loin du regard des médias nationaux, loin des champs de bataille irakiens ou afghans, une armée de protestants américains se met en ordre de combat afin de "reconquérir l’Amérique pour le Christ". Jesus camp, le documentaire d’Heidi Ewing et Rachel Grady montre le fonctionnement de cette "armée de Dieu" dont les soldats les plus prometteurs sont des enfants.
Car ces protestants évangéliques imposent à leurs enfants de vivre et penser à travers ce que dit la Bible. Toute leur vie doit être inspirée par Dieu : ils dansent pour le Christ sur du Heavy metal chrétien, jouent avec les poupées Adam et Eve copiées sur Barbie et Ken, ne lisent pas Harry Potter, parce qu’un héros sorcier est une chose sacrilège ; ils passent des vacances dans le camp du "Christ Triomphant". Ils manifestent sans cesse leur foi : ils pleurent ou s’agitent, en transe, lors de cérémonies collectives dans les Eglises évangéliques. Ils prient pour tout : pour la nomination d’un juge conservateur à la Cour Suprême, pour qu’il n’y ait pas de coupure d’électricité lors d’un spectacle évangélique, pour réussir un strike au bowling. Ces enfants-soldats doivent aussi prêcher la bonne parole auprès d’inconnus.

L’enrôlement des enfants a un aspect très politique. En plus de leurs positions créationnistes, anti-avortement, anti-écologistes, les protestants évangéliques soutiennent ouvertement l’administration Bush. Ils votent en fonction de leurs convictions religieuses. Ils veulent pouvoir se défendre face à la montée de l’intégrisme musulman. Ils travaillent à la mise en place d’un Etat théocratique en Amérique.
Ce documentaire saisissant illustre ainsi une "autre logique d’organisation de l’espace mondial" que celle de la mondialisation (Géographie, Terminales S, ES et L), puisqu’il montre un fondamentalisme teinté de nationalisme, sous-tendu par l’idée du "choc des civilisations" (Samuel Huntington). Il rappelle aussi que dans le modèle américain, les Etats-Unis sont censés être la "nation de Dieu" (Histoire, Terminales ES et L). Il fournit quelques éclaircissements quant à la politique de l’administration Bush.
Ce tableau d’une collusion entre intérêts religieux et politiques aux Etats-Unis pourra être nuancé à travers l’article de la revue Religioscope, qui montre qu’il existe plusieurs courants politiques au sein même des évangéliques. Toutefois, il rejoint en de nombreux points les analyses de Sébastien Fath (Dieu bénisse l’Amérique, Seuil, 2004) et Mokhtar Ben Barka (Les nouveaux rédempteurs : le fondamentalisme protestant aux Etats-Unis, éd. de l’Atelier, 1998) ainsi que celles du CNRS sur le créationnisme américain.

Critique

Une guerre a aujourd’hui lieu sur le territoire des Etats-Unis. Loin du regard des médias nationaux, loin des champs de bataille irakiens ou afghans, une armée de protestants américains se met en ordre de combat afin de "reconquérir l’Amérique pour le Christ". Jesus camp, le documentaire d’Heidi Ewing et Rachel Grady montre le fonctionnement de cette "armée de Dieu" dont les soldats les plus prometteurs sont des enfants.
Car ces protestants évangéliques imposent à leurs enfants de vivre et penser à travers ce que dit la Bible. Toute leur vie doit être inspirée par Dieu : ils dansent pour le Christ sur du Heavy metal chrétien, jouent avec les poupées Adam et Eve copiées sur Barbie et Ken, ne lisent pas Harry Potter, parce qu’un héros sorcier est une chose sacrilège ; ils passent des vacances dans le camp du "Christ Triomphant". Ils manifestent sans cesse leur foi : ils pleurent ou s’agitent, en transe, lors de cérémonies collectives dans les Eglises évangéliques. Ils prient pour tout : pour la nomination d’un juge conservateur à la Cour Suprême, pour qu’il n’y ait pas de coupure d’électricité lors d’un spectacle évangélique, pour réussir un strike au bowling. Ces enfants-soldats doivent aussi prêcher la bonne parole auprès d’inconnus.

L’enrôlement des enfants a un aspect très politique. En plus de leurs positions créationnistes, anti-avortement, anti-écologistes, les protestants évangéliques soutiennent ouvertement l’administration Bush. Ils votent en fonction de leurs convictions religieuses. Ils veulent pouvoir se défendre face à la montée de l’intégrisme musulman. Ils travaillent à la mise en place d’un Etat théocratique en Amérique.
Ce documentaire saisissant illustre ainsi une "autre logique d’organisation de l’espace mondial" que celle de la mondialisation (Géographie, Terminales S, ES et L), puisqu’il montre un fondamentalisme teinté de nationalisme, sous-tendu par l’idée du "choc des civilisations" (Samuel Huntington). Il rappelle aussi que dans le modèle américain, les Etats-Unis sont censés être la "nation de Dieu" (Histoire, Terminales ES et L). Il fournit quelques éclaircissements quant à la politique de l’administration Bush.
Ce tableau d’une collusion entre intérêts religieux et politiques aux Etats-Unis pourra être nuancé à travers l’article de la revue Religioscope, qui montre qu’il existe plusieurs courants politiques au sein même des évangéliques. Toutefois, il rejoint en de nombreux points les analyses de Sébastien Fath (Dieu bénisse l’Amérique, Seuil, 2004) et Mokhtar Ben Barka (Les nouveaux rédempteurs : le fondamentalisme protestant aux Etats-Unis, éd. de l’Atelier, 1998) ainsi que celles du CNRS sur le créationnisme américain.