Les Femmes de l'ombre : opération jupons

Les Femmes de l'ombre : opération jupons

Dans un article publié en novembre 1993 dans la revue L’Histoire Olivier Wieviorka, spécialiste de la Seconde Guerre mondiale et par ailleurs conseiller historique des Femmes de l’ombre, pronostiquait "La fin des héros", expliquant que l’histoire de la Résistance avait dépassé le mythe de l’"armée des ombres", se révélant multiforme, diverse, ambiguë parfois.Mais le cinéma a besoin de héros, en l’occurrence d’héroïnes. Louise Desfontaine (Sophie Marceau) est l’une d’elles : au printemps 1944, après la mort de son mari, elle rejoint le SOE (Special Operations Executive : service secret de renseignement et de sabotage mis en place par Churchill en 1940 pour contrôler les opérations de résistance en France) en Angleterre. Chargée d’exfiltrer un agent britannique tombé aux mains des Allemands, la toute fraîche espionne recrute son propre commando et se lance à l'assaut de la Gestapo. Comme on peut l'imaginer, la mission ne se déroulera pas comme sur des roulettes.Si le film de Jean-Paul Salomé a le mérite de mettre à l’honneur ces femmes résistantes que l’Histoire a tardé à reconnaître (leur rôle fut ignoré à la Libération, ce qui reflète la place de la femme dans la société française d’après-guerre), on regrettera qu’il film sombre aussi vite dans la caricature et l'invraisemblance, et délaisse ses personnages (cantonnées à des types bien définis : la pute au grand cœur, la femme fatale, la sainte-nitouche, la femme d’action) au profit de fastidieuses scènes de torture ou de fusillade.Plus grave, le film entretient une certaine ambiguïté dans son rapport à l’histoire qui pourrait semer la confusion chez les élèves : alors que la trame policière n’est construite sur aucun fait historique avéré (le réalisateur Jean-Pierre Salomé le dit clairement sur le site officiel du film), le film s'ouvre et se clôt sur des images d’archives (photographies de femmes armées, images de la Libération de Paris). Si le personnage de Sophie Marceau a été inspiré par une résistante, Lise de Baissac, le scénario reprend sans le citer l'intrigue d’un roman de Ken Follet, Réseau Corneille (paru en 2004). C’est finalement par l’attention portée aux décors et aux costumes que le film pourrait intéresser les enseignants : le Paris occupé est bien restitué, notamment lors d'une scène intéressante dans le métro. C’est d’ailleurs un des aspects auxquels s’attache le dossier Séance + du CRDP de Paris, qui délaisse ces fameuses "femmes de l’ombre", prenant plutôt le film comme un prétexte pour présenter les préparatifs et le contexte du débarquement, la vie sous l’occupation, et les différentes formes de résistances.

[Les Femmes de l'ombre de Jean-Paul Salomé. 2007. Durée : 1 h 58. Distribution : TFM. Sortie le 5 mars 2008]

Dans un article publié en novembre 1993 dans la revue L’Histoire Olivier Wieviorka, spécialiste de la Seconde Guerre mondiale et par ailleurs conseiller historique des Femmes de l’ombre, pronostiquait "La fin des héros", expliquant que l’histoire de la Résistance avait dépassé le mythe de l’"armée des ombres", se révélant multiforme, diverse, ambiguë parfois.Mais le cinéma a besoin de héros, en l’occurrence d’héroïnes. Louise Desfontaine (Sophie Marceau) est l’une d’elles : au printemps 1944, après la mort de son mari, elle rejoint le SOE (Special Operations Executive : service secret de renseignement et de sabotage mis en place par Churchill en 1940 pour contrôler les opérations de résistance en France) en Angleterre. Chargée d’exfiltrer un agent britannique tombé aux mains des Allemands, la toute fraîche espionne recrute son propre commando et se lance à l'assaut de la Gestapo. Comme on peut l'imaginer, la mission ne se déroulera pas comme sur des roulettes.Si le film de Jean-Paul Salomé a le mérite de mettre à l’honneur ces femmes résistantes que l’Histoire a tardé à reconnaître (leur rôle fut ignoré à la Libération, ce qui reflète la place de la femme dans la société française d’après-guerre), on regrettera qu’il film sombre aussi vite dans la caricature et l'invraisemblance, et délaisse ses personnages (cantonnées à des types bien définis : la pute au grand cœur, la femme fatale, la sainte-nitouche, la femme d’action) au profit de fastidieuses scènes de torture ou de fusillade.Plus grave, le film entretient une certaine ambiguïté dans son rapport à l’histoire qui pourrait semer la confusion chez les élèves : alors que la trame policière n’est construite sur aucun fait historique avéré (le réalisateur Jean-Pierre Salomé le dit clairement sur le site officiel du film), le film s'ouvre et se clôt sur des images d’archives (photographies de femmes armées, images de la Libération de Paris). Si le personnage de Sophie Marceau a été inspiré par une résistante, Lise de Baissac, le scénario reprend sans le citer l'intrigue d’un roman de Ken Follet, Réseau Corneille (paru en 2004). C’est finalement par l’attention portée aux décors et aux costumes que le film pourrait intéresser les enseignants : le Paris occupé est bien restitué, notamment lors d'une scène intéressante dans le métro. C’est d’ailleurs un des aspects auxquels s’attache le dossier Séance + du CRDP de Paris, qui délaisse ces fameuses "femmes de l’ombre", prenant plutôt le film comme un prétexte pour présenter les préparatifs et le contexte du débarquement, la vie sous l’occupation, et les différentes formes de résistances.

[Les Femmes de l'ombre de Jean-Paul Salomé. 2007. Durée : 1 h 58. Distribution : TFM. Sortie le 5 mars 2008]