Mon Führer : Hitler, connais pas !
Mon Führer se termine par une sorte de micro-trottoir qui pose la question suivante à des jeunes allemands d’aujourd’hui : d'après vous, qui était Adolph Hitler ? On ne sait si le réalisateur n’a sélectionné que les plus ignares, mais la tonalité de la séquence est claire : pour reprendre le titre d’un film de Bertrand Blier, "Hitler, connais pas !".Cette séquence finale ajoute à la perplexité dans laquelle nous plonge le film de Dani Levy : car à l’ignorance qu’il déplore chez les jeunes générations, il ne pourra ajouter que de la confusion. Au-delà de la volonté de transgression et de provocation (Dani Levy reprend même la fameuse "scène de la douche", devenue à la fois le lieu commun et le chiffon rouge des films sur les camps), on se demande durant toute la projection où veut en venir le film, et quel intérêt il y a à présenter Hitler en bouffon pathétique, s'en remettant à son ancien professeur de théâtre juif.Toute dictature est par essence ridicule (par le culte de la personnalité, la paranoïa, la boursouflure de l’appareil bureaucratique), mais n’est pas Lubitsch (To be or not to be) ou Chaplin (Le Dictateur) qui veut. Si l’on peut s’esclaffer à quelques gags hénaurmes (le chien qui fait le salut nazi, la fausse demi-moustache de Hitler) ou sourire de certaines répliques grinçantes ("Cette histoire de juifs, n’en faites pas une affaire personnelle"), c'est l'impression de malaise qui domine. Sous ses dehors iconoclastes, on pourra juger assez dangereuse la façon que Mon Führer a d'euphémiser l’expérience concentrationnaire (des types qui cassent des cailloux en pyjama rayé) et le sort des juifs (Grünbaum retrouvera sans difficulté sa femme et ses enfants déportés).
> Peut-on rire d'Adolf Hitler ? (notre article du 21/01/07)> Un autre "portrait" de Hitler : Peut-on utiliser La Chute (Der Untergang) en classe ?
[Mon Führer de Dani Levy. 2006. Durée : 1 h 37. Distribution : Jour2Fête. Sortie le 12 mars 2008]