Contes de l'âge d'or : la vie des uns

Contes de l'âge d'or : la vie des uns

Comment revivifier un genre tombé en désuétude depuis la fin des années 70, celui du "film à sketches" ? Contes de l'âge d'or (Amintiri de epoca de aur) bénéficiera certainement de la curiosité pour le jeune cinéma roumain, qui s'illustre régulièrement depuis quelques années dans les festivals internationaux, et dont Cristian Mungiu (Palme d'Or 2007 pour 4 mois, 3 semaines et 2 jours) est ici à la fois le chef de file (il a produit le film) et la tête de gondole (il signe un épisode). Mais, une fois n'est pas coutume, c'est moins l'accumulation de prestigieuses signatures qui interpelle ici (comme dans les projets du type Paris je t'aime, Chacun son cinéma), qu'un sujet en parfaite cohérence avec la forme brève. "L'âge d'or" évoqué par le titre, c'est en effet le crépuscule de la dictature communiste de Ceaucescu ; les "contes" en question sont les légendes urbaines, drôles ou terrifiantes que se racontaient à voix basse les gens ordinaires. Comme le résume le synopsis du film : "Ces légendes à la fois comiques, bizarres et surprenantes, puisent dans les événements souvent surréalistes vécus au quotidien sous le régime communiste. L’humour fut à cette époque la bouée de sauvetage des Roumains et Tales from the Golden Age tente de restituer cette atmosphère en montrant une nation luttant pour sa survie au quotidien face à la logique insensée de la dictature. Tales from the Golden Age se compose de cinq histoires courtes liées entre elles par leur état d’esprit, leur structure narrative et leur contexte historique : la seule marque de voiture qu’on voit partout dans les rues, c’est la Dacia, fabriquée en Roumanie ; tout le monde survit en volant l’Etat ; il faut obéir aux ordres du Parti même s’ils sont illogiques et absurdes."Contes de l'âge d'or c'est ainsi l'anti-La Vie des autres : les petits tracas de l'homme de la rue plutôt que la grande tragédie des dissidents, la satire plutôt que le réquisitoire. Le résultat est aussi drôle qu'instructif, tout en se heurtant aux limites du genre. La forme du film à sketches, peut-être fastidieuse pour le spectateur, en fait en tout cas un support pédagogique idéal pour les enseignants d'histoire (en salles et plus encore sans doute en DVD) : poids étouffant de la bureaucratie et du régime du parti unique, contrôle idéologique et propagande, difficultés économiques et marché noir, ces Contes de l'âge d'or constituent un tableau remarquablement parlant et complet d'un pays du bloc de l'Est au tournant des années quatre-vingt.

Contes de l'âge d'or de Hanno Höfer, Rãzvan Mãrculescu, Cristian Mungiu, Constantin Popescu et Ioana Uricaru, Roumanie-France, 2009, Sélection Officielle Un Certain Regard

Comment revivifier un genre tombé en désuétude depuis la fin des années 70, celui du "film à sketches" ? Contes de l'âge d'or (Amintiri de epoca de aur) bénéficiera certainement de la curiosité pour le jeune cinéma roumain, qui s'illustre régulièrement depuis quelques années dans les festivals internationaux, et dont Cristian Mungiu (Palme d'Or 2007 pour 4 mois, 3 semaines et 2 jours) est ici à la fois le chef de file (il a produit le film) et la tête de gondole (il signe un épisode). Mais, une fois n'est pas coutume, c'est moins l'accumulation de prestigieuses signatures qui interpelle ici (comme dans les projets du type Paris je t'aime, Chacun son cinéma), qu'un sujet en parfaite cohérence avec la forme brève. "L'âge d'or" évoqué par le titre, c'est en effet le crépuscule de la dictature communiste de Ceaucescu ; les "contes" en question sont les légendes urbaines, drôles ou terrifiantes que se racontaient à voix basse les gens ordinaires. Comme le résume le synopsis du film : "Ces légendes à la fois comiques, bizarres et surprenantes, puisent dans les événements souvent surréalistes vécus au quotidien sous le régime communiste. L’humour fut à cette époque la bouée de sauvetage des Roumains et Tales from the Golden Age tente de restituer cette atmosphère en montrant une nation luttant pour sa survie au quotidien face à la logique insensée de la dictature. Tales from the Golden Age se compose de cinq histoires courtes liées entre elles par leur état d’esprit, leur structure narrative et leur contexte historique : la seule marque de voiture qu’on voit partout dans les rues, c’est la Dacia, fabriquée en Roumanie ; tout le monde survit en volant l’Etat ; il faut obéir aux ordres du Parti même s’ils sont illogiques et absurdes."Contes de l'âge d'or c'est ainsi l'anti-La Vie des autres : les petits tracas de l'homme de la rue plutôt que la grande tragédie des dissidents, la satire plutôt que le réquisitoire. Le résultat est aussi drôle qu'instructif, tout en se heurtant aux limites du genre. La forme du film à sketches, peut-être fastidieuse pour le spectateur, en fait en tout cas un support pédagogique idéal pour les enseignants d'histoire (en salles et plus encore sans doute en DVD) : poids étouffant de la bureaucratie et du régime du parti unique, contrôle idéologique et propagande, difficultés économiques et marché noir, ces Contes de l'âge d'or constituent un tableau remarquablement parlant et complet d'un pays du bloc de l'Est au tournant des années quatre-vingt.

Contes de l'âge d'or de Hanno Höfer, Rãzvan Mãrculescu, Cristian Mungiu, Constantin Popescu et Ioana Uricaru, Roumanie-France, 2009, Sélection Officielle Un Certain Regard