
Les Pépites : quand l’école sauve
En avril 1995, Christian et Marie-France des Pallières découvrent la décharge de Phnom Penh. Horrifiés par la situation des enfants qui y travaillent, ils décident de les aider à sortir de la misère. Très classique dans sa forme, Les Pépites choisit une approche chronologique pour raconter le parcours de Christian et Marie-France des Pallières depuis la fondation de leur association, Pour un sourire d’enfant (PSE), en 1995. La démarche du réalisateur Xavier de Lausanne, consiste à mettre en mots et en images la réflexion du couple, par des entretiens (avec le couple ou des enfants de l’école) mais aussi grâce aux nombreuses images filmées depuis le début du projet par Christian des Pallières lui-même. Ce récit chronologique a certes une dimension très didactique (même si certaines séquences viennent casser le côté très intimiste du dispositif et redonner du rythme au film comme cette scène, probablement filmé avec un drone, d’arrivée à l’école d’une foule d’enfants en uniforme bleu et blanc). Il permet cependant au réalisateur de poser clairement les enjeux du projet.
Le premier enjeu est celui de la construction d’un projet humanitaire : comment aider ces enfants à sortir de la décharge et de la misère ? De quoi ont-ils besoin ? Comment impliquer les acteurs locaux dans le projet ? À cet égard, la démarche de Christian et Marie-France des Pallières apparaît, dans l’oeil de Xavier de Lausanne, comme exemplaire : au lieu de plaquer un projet préconçu sur la situation des enfants de la décharge, ils vont directement interroger ceux-ci sur leurs besoins. À la demande des enfants, ils commencent ainsi par distribuer un repas par jour, puis fondent une école, répondant à leur souhait d’accéder à l’enseignement.
Les Pépites tisse ainsi une réflexion sur l’éducation. En nous transportant à Pnom Penh, dans un contexte complètement différent de celui d’un pays développé, le film nous donne à mesurer l’importance de l’éducation qui permet aux enfants de la décharge d’accéder à un autre univers, de sortir de la misère et de construire leur vie. C’est une réflexion à laquelle nos élèves (qui voient souvent l’école comme une contrainte) sont souvent sensibles - en témoigne le succès du documentaire Sur le chemin de l’école.
Nul doute que Les Pépites a le potentiel pour susciter le même engouement. En effet, le film est particulièrement émouvant, notamment lorsqu’il dresse le portrait de certains enfants accueillis par PSE. Là aussi, les images d’archives servent parfaitement l’hommage rendu par le film à Christian et Marie-France des Pallières : elles permettent de créer un contraste saisissant entre la détresse des enfants à leur arrivée dans l’école et leur vie dix ou vingt ans après. À travers les récits des enfants - le travail forcé à la décharge, mais aussi la maltraitance exercée sur eux par leurs parents, la prostitution, les viols – se dessine en creux l’histoire d’un pays encore traumatisé par la violence du régime khmer.
La violence de certains propos - l’un des enfants raconte la mort d’un de ses camarades écrasé par un camion sur la décharge - rendent cependant le film inadapté à un public trop jeune. À partir de la 3e, le film peut être utilisé comme outil pédagogique, mais il reste important de discuter du film avec les élèves avant tout visionnage. D’une part pour leur expliquer l’histoire récente du Cambodge, notamment la période khmer, et ainsi permettre une meilleure compréhension de certains enjeux du film. D’autre part pour les préparer psychologiquement aux témoignages de certains enfants.
En classe de français le film peut s’insérer dans plusieurs problématiques du programme de 3e : « Dénoncer les travers de la société », « Agir dans la cité, individu et pouvoir », et « Se raconter, se représenter ». En cours de Géographie, le film permettra au professeur de creuser la question des villes durables. Au-delà de cette inscription dans les programmes scolaires, le film peut aussi être un moyen de sensibiliser les élèves au partage, à l’ouverture sur l’autre et à la solidarité, des valeurs primordiales pour la construction de leur citoyenneté.
Merci à Caroline Birouste, professeure de français, pour sa contribution à cet article